Spelling suggestions: "subject:"ecocriticism"" "subject:"sociocritique""
41 |
Scénographies mémorielles et figurations médiatiques de la guerre d’AlgérieMaazouzi, Djemaa 11 1900 (has links)
Cette thèse montre comment fonctionnent et se déploient, au sein des œuvres littéraires, filmiques et webfilmiques, des scénographies mémorielles et des figurations médiatiques de la guerre d’Algérie. Empruntant sa méthodologie à la sociocritique des textes et aux études intermédiales, l’étude porte sur la manière dont le souvenir de l’évènement se confond avec celle de le relater. Elle examine le rôle du médium qui donne une forme, une matérialité, un dispositif, un type de reconnaissance institutionnelle aux représentations de la guerre et de la mémoire, contribuant aussi à former, modeler le souvenir en le rendant perceptible et intelligible.
Comment les groupes de mémoire de la guerre d’Algérie, (harkis, immigration algérienne, pieds-noirs) vivent-ils – toutes proportions et différences gardées – leur rapport au passé à partir du présent ? Leurs mémoires, médiées par les vecteurs culturels (cinéma, littérature, etc.), se disent à partir de sites d’énonciations plurielles dont les espaces (topographies) et les temps (chronographies) sont communs. Elles s’approprient le souvenir de façon similaire, par les scènes narratives du procès, de la rencontre ou du retour construites par le texte littéraire ou filmique.
La première partie interroge les rapports entre histoire et mémoire ; en France, leurs conceptions et pratiques, se heurtent à une nouvelle économie mémorielle dans laquelle des groupes de mémoire de la guerre d’Algérie réclament que leur histoire soit reconnue et enseignée. Appuyée par une périodisation de la production gigantesque des cinquante dernières années et par une revue critique de la recherche internationale menée à ce sujet, cette réflexion prend acte de la dispute post-coloniale française et considère l’auteur porteur de mémoire de la guerre d’Algérie pour son exemplarité en tant que témoin post-colonial.
Les deuxième, troisième et quatrième parties de cette thèse déplient quant à elles, la scénographie mémorielle spécifique à trois auteurs, tout en la mettant en relation avec d’autres œuvres de genre et médium très différents. Le premier corpus est composé de : Moze de Zahia Rahmani, du tryptique de Mehdi Charef (À-bras-le-cœur, 1962. Le dernier voyage, Cartouches gauloises) et d’Exils de Tony Gatlif. À ces titres s’ajoutent des œuvres qui marquent une série, ensemble aux contours flous auxquels ils se rattachent et qui permettent de mettre à la fois en perspective le commun entretenu entre la série et l’œuvre de l’un des trois auteurs, et la manière dont l’auteur, Rahmani, Charef ou Gatlif s’en distingue de façon significative. Enfin, un troisième type d’œuvres intervient dans l’analyse comme contrepoint souvent paradoxal de cette série. / This dissertation shows how heritage-forming scenarios and media portrayals of the Algerian War have operated and been deployed in literature and cinema, as well as in films on the Web. Taking its methodology from both literary sociocriticism and intermedia studies, the study focuses on how the memory of events becomes confused with how the events are portrayed. The dissertation examines the role of the media that give form, material character, instrumentality and a kind of institutional recognition to depictions of the Algerian War and people’s memories of it, thereby helping to form and model recollections by making them perceptible and intelligible.
How do the corpuses of Algerian War memories (of harkis, Algerian immigrants and pieds-noirs) respectively relate to the past from the standpoint of the present? Mediated by cultural vehicles like cinema and literature, these memories are described through pluralistic “enunciation sites” that nonetheless share common spaces (topographies) and eras (chronographies). The memories appropriate the faculty of memory in a similar fashion – through the narrative scenes of trials, encounters or return portrayed in literature or films.
The first part of the study explores the relationship between history and memory, now that the conceptions and practices of those concerned are clashing with a new “remembering economy” in which groups who remember the Algerian War are demanding that their history be recognized and taught. Based on a chronological framework of the various periods in producing this enormous body of work over the past 50 years as well as on a critical review of international research on this war, the study takes due note of post-colonial conflict in France and considers certain writers as memory-bearers of the Algerian War and even exemplary post-colonial witnesses of it.
The second, third and fourth parts of the dissertation deconstruct the heritage-forming narratives of three writers in particular and relate their narratives to other works in very different genres and media. The three writers, who constitute the primary corpus for this study, are Zahia Rahmani (Moze), Mehdi Charef (his tryptich of À-bras-le-cœur, 1962, le dernier voyage and Cartouches gauloises) and Tony Gatlif (Exils). This basic corpus is supplemented by a number of other works that together constitute a vaguely outlined series that provides perspective on both the commonalities and significant differences of each of the writers (Rahmani, Charef or Gatlif) in relation to the series. In conclusion, a third body of works is adduced as an often paradoxical contrast to the primary series.
|
42 |
Scénographies mémorielles et figurations médiatiques de la guerre d’AlgérieMaazouzi, Djemaa 11 1900 (has links)
No description available.
|
43 |
L'engagement littéraire contemporain ou la dénonciation d'un inacceptable : éléments pour une poétique transculturelle / Contemporary Literary Commitment as Denunciation of an Unacceptable : Elements for a Cross-cultural PoeticsChaudet, Chloé 14 October 2014 (has links)
Loin d’être un terme dépassé, « l’engagement » reste, au prix de certains élargissements, une notion opératoire pour l’analyse littéraire, tant en Occident que dans d’autres régions du monde. Repenser l’engagement littéraire comme la « dénonciation d’un inacceptable » permet de mettre au jour et de confronter les stratégies rhétorico-poétiques caractérisant la production littéraire d’auteurs contemporains aussi divers que Waris Dirie, Peter Handke, Jean-Marie Gustave Le Clézio, Toni Morrison, Taslima Nasreen, Ben Okri, Orhan Pamuk, Salman Rushdie et Luis Sepúlveda. Nous cherchons ainsi à mettre en évidence l’intégration par les textes étudiés d’éléments idéaux-typiques de l’engagement littéraire, de l’investissement auctorial à la confrontation au politique. Ces éléments, liés à des discours théoriques dont certains ont parcouru tout le vingtième siècle, sont examinés selon leurs différentes élaborations dans les textes. En effet, c’est en faisant évoluer certains de ses traits idéaux-typiques que les auteurs étudiés renouvellent l’engagement littéraire. On peut dès lors présenter celui-ci comme la dénonciation, pas systématiquement polémique, d’un inacceptable. Cette notion d’« inacceptable », qui suppose entre autres la construction textuelle d’un jugement moral, permet ainsi d’entreprendre non seulement une analyse transhistorique, qui déborde la conceptualisation sartrienne, mais également une approche transculturelle de l’engagement littéraire. / Far from being an outdated notion, "commitment" remains, with some enlargements, a valid concept for literary analysis, in the West as much as in other regions of the world. Rethinking literary commitment as the "denunciation of an unacceptable" allows us to unfold and compare the various rhetorical and poetic strategies characterizing the literary production of contemporary authors as diverse as Waris Dirie, Peter Handke, Jean-Marie Gustave Le Clézio, Toni Morrison, Taslima Nasreen, Ben Okri, Orhan Pamuk, Salman Rushdie and Luis Sepúlveda. We seek to highlight the ideal-typical elements of literary commitment in these texts, such as the authorial presence or the advocacy of certain political programmes. These elements are related to various theoretical discourses, some of which have traveled through the twentieth century. We examine their different patterns in the texts, showing that our authors renew literary commitment through the reorganization and alteration of its usual features. Thus, we define literary commitment as the denunciation of an unacceptable that is not necessarily polemical. The notion of "unacceptable", which implies the textual construction of a moral judgment, allows us not only to undertake a transhistorical analysis, which goes beyond the Sartrean conceptualization, but also to engage in a cross-cultural study of literary commitment.
|
44 |
La vie économique dans le roman québécois (1956-1983) : représentations, histoire et pratiquesNadon, Rachel 05 1900 (has links)
Cette thèse propose une analyse, par le prisme de l’imaginaire social, d’œuvres littéraires québécoises qui mettent en scène la vie économique, depuis la phase d’essor industriel qui marque l’après-guerre jusqu’aux années 1980. Conjuguant l’histoire culturelle et la sociocritique, nous étudions les représentations de la vie économique, leurs conditions de possibilité, de production et de circulation. Notre travail s’intéresse à la dimension idéologique et politique des classes populaires, des ouvriers et des ouvrières fictifs chez des auteurs marginaux (Jean-Jules Richard, Pierre Gélinas, Germain Archambault, Maurice Gagnon et Élisabeth Vonarburg) et d’autres plus connus (Claude Jasmin, Jacques Ferron, Jacques Renaud, Francine Noël). Tout comme la figure de l’écrivain, le personnage du travailleur est un « foyer normatif complexe » (Hamon, 1984). En croisant l’analyse de différentes productions culturelles avec la lecture approfondie de romans choisis, nous interrogeons le présumé désintérêt de la littérature québécoise envers les questions qui concernent la vie économique.
Nous tentons d’abord de repenser les catégories de l’histoire littéraire, soit le réalisme, le régionalisme, le « documentaire » et le roman social. Une analyse du discours des écrivains et des critiques dans les périodiques révèle les différentes définitions du rôle social de la littérature et de l’écrivain qui circulent dans les années 1950. La réception contrastée des romans sociaux signale leur qualité littéraire parfois moyenne, mais un enthousiasme pour les représentations du « milieu ». Articulant histoire, politique et travail industriel, les romans de Pierre Gélinas et de Jean-Jules Richard offrent un point de vue informé par une sensibilité communiste sur les grèves ouvrières de l’époque. Dans leurs œuvres, tout comme dans celles publiées à la revue et aux Éditions Parti pris, les représentations des femmes proposent par leur complexité une perspective éclairante sur la vie économique. La figure du chauffeur de taxi, coureur des bois (et des rues) moderne, témoigne exemplairement de l’exploration de la marginalité et de la mobilité qu’on retrouve dans plusieurs parutions de la maison d’édition. Le dernier chapitre s’attache à la figure de la ménagère et à la question du travail ménager. En étudiant Maryse de Francine Noël et Le Silence de la Cité d’Élisabeth Vonarburg, nous réévaluons les présupposés selon lesquels le réalisme serait la forme privilégiée de la représentation économique. / This thesis proposes an analysis, through the prism of the imaginaire social, of literay works that represent economic life, from the industrial boom that marked the post-war period to the 1980s. Combining cultural history and sociocriticism, we study the representations of economic life, their conditions of possibility, production and circulation. Our work focuses in particular on the ideological and political dimension of the working classes and of fictitious workers among marginal authors (Jean-Jules Richard, Pierre Gélinas, Germain Archambault, Maurice Gagnon and Élisabeth Vonarburg) and others who are better known (Claude Jasmin, Jacques Ferron, Jacques Renaud, Francine Noël). As the figure of the writer, the worker is a “complex normative focus” (Hamon, 1984). By crossing the analysis of different cultural productions with the reading of specific novels, the thesis questions the supposed disinterest of Québec literature for economic life.
We first attempt to rethink the categories and oppositions of literary history: realism, regionalism, “documentary” and the social novel. An analysis of the discourse of writers and critics in periodicals sheds light on the different definitions of the social role of literature and of the writer circulating in the 1950s discourse. The contrasting reception of social novels indicates the average literary quality of some of those literary works but a certain enthusiasm for social representations. Articulating history, politics and industrial work, the novels of Pierre Gélinas and Jean-Jules Richard offer a marginal point of view on the workers' strikes of the time informed by a communist sensibility. In their works, as in those published in the review and in Éditions Parti pris, the representations of women offer, by their complexity, a significant perspective on economic life. The exploration of marginality and mobility in the publishing house's publications creates the figure of the taxi driver, a modern-day coureur des bois. The last chapter focuses on the figure of the housewife and on the issue of housework. By studying Francine Noël's Maryse and Élisabeth Vonarburg's Le Silence de la Cité, we reassess the presupposition that realism is the preferred form of economic representation.
|
45 |
Le Printemps érable au Journal de Montréal : figures de l’imaginaire social et mise en récitRoy, Jean-Philippe 08 1900 (has links)
Le présent mémoire se penche sur la couverture de la grève étudiante québécoise de 2012, souvent appelée le Printemps érable, dans les pages du Journal de Montréal. Dans une approche sociocritique des textes (Claude Duchet, Edmond Cros, Régine Robin) et en mettant à l’épreuve le concept d’imaginaire social tel qu’il a été réélaboré par Pierre Popovic, nous nous demandons en quoi et comment ce média a pu favoriser les antagonismes entre les groupes sociaux en cause. En analysant la couverture journalistique, aussi bien les premières pages, les caricatures, les reportages, les chroniques que les lettres des lecteurs, et en étudiant la façon dont ce corpus interagit avec les dimensions iconique et poétique de l’imaginaire social, nous parvenons à dégager des effets de mise en récit, de poétisation et de fictionnalisation fort singuliers. Si notre hypothèse théorique est celle d’un lien dynamique entre le corpus et les représentations qui circulent dans l’imaginaire collectif, notre hypothèse herméneutique, elle, nous mène à explorer la manière dont ce quotidien montréalais a construit et diffusé des figures de substitution aux intervenants réels par lesquelles chacun pouvait peu ou prou se sentir interpellé : l’Automobiliste, le Contribuable, le Démocrate, le Commerçant, le Ti-Joe connaissant, l’Enfant roi, l’Artiste, le Bébé gâté, le Radical, l’Intimideur, le Gauchiste, le Terroriste. Regroupées en deux factions rivales, la « Rue » et la « Majorité silencieuse », ces figures substitutives ont participé à l’émergence d’un récit particulier des événements, celui d’un assaut hypocrite et pernicieux porté à la démocratie québécoise. Quand un journaliste titre « Party au centre-ville », que suggère-t-il sur les grévistes et comme récit de la manifestation? Que révèle le diptyque caricatural proposé par Marc Beaudet replongeant le lecteur tout droit en pleine crise d’Oka? Que vient faire dans cette histoire le dernier film de Christopher Nolan, Batman, The Dark Knight Rises? Voilà le genre de questions auxquelles ce mémoire apporte très concrètement des réponses. / This Master’s essay examines coverage of the 2012 Quebec student protests, often called the « Maple Spring », by the Journal de Montréal. Through a sociocritical approach (Claude Duchet, Edmond Cros, Régine Robin) and using the concept of social imaginary (Pierre Popovic), we ask why and how this publication could breed antagonism between the social groups in question. By dissecting the journalistic coverage (front pages, caricatures, articles, columns, readers’ opinions) and studying the interactions between this corpus and the iconic and poetic dimensions of the social imaginary, we come to identify singular storytelling effects, as well as poeticization and fictionalization effects. If our theoretical hypothesis is based on a dynamic link between the corpus and some active representations in the collective imaginary, our hermeneutic hypothesis leads us to explore the different ways in which the Montreal daily constructed and provided substitution figures for its actual speakers through which readers could more or less take position : the Driver, the Taxpayer, the Democrat, the Business Owner, the Know-It-All, the Spoiled Brat, the Over-Indulged Child, the Artist, the Radical, the Bully, the Lefty and the Terrorist. Grouped into two rival factions, the "Street" and the "Silent Majority", these substitution figures were all key players in the emergence of a certain reshaping of events suggesting a hypocritical and pernicious assault against Quebec democracy. When a journalist titles his text "Party downtown," what does he implies about strikers and the narrative of the event? What does the caricature diptych proposed by Marc Beaudet, bringing the reader right back in the middle of the Oka crisis, reveal? How is Christopher Nolan’s last film, Batman: The Dark Knight Rises relevant to the « Maple Spring »? These are some of the questions that this essay endeavour to answer in very concrete terms.
|
46 |
«Un chant sinistre sur un air bouffon» : étude sociocritique des représentations de la fête dans trois romans de Victor HugoMarcotte, Viviane 08 1900 (has links)
Cette thèse a pour objet l’ensemble des manifestations festives que donnent à lire trois romans de Victor Hugo : Notre-Dame de Paris, Les Misérables et Quatrevingt-treize. Son hypothèse générale est que la fête, lorsqu’elle est envisagée comme rite collectif, prend en charge les différentes tensions qui, au XIXe siècle, escortent l’évolution des statuts du citoyen, du devenir historique et des rapports entre le peuple et le pouvoir. La récurrence de certains motifs tend à montrer que la thématisation et l’écriture de la fête chez Hugo sont soumises à deux lois. La première consiste en la cohabitation sociale du sublime et du grotesque. La deuxième repose sur le détournement des ressources scripturales, formelles, rhétoriques du carnavalesque vers un tableau sinistre et funèbre. L’étude sociocritique de ces différentes scènes met en lumière les relations que les romans hugoliens entretiennent avec l’imaginaire social de la Révolution française, de la Restauration et du Second Empire, tout particulièrement à l’égard des débats sur la misère, sur le sens du pouvoir et sur la notion de progrès. / This thesis focuses on the festive events in three novels by Victor Hugo : Notre-Dame de Paris, Les Misérables and Quatrevingt-treize. Its general hypothesis is that the festival, when considered as a collective rite, takes charge of the different tensions in the nineteenth century that escort the evolution of the status of the citizen, of the historical future and of the relationship between the people and the power. The recurrence of certain motifs tends to show that the thematization and the writing of the festival in Hugo’s work is subject to two laws. The first consists in the social cohabitation of the sublime and the grotesque. The second is based on the detour of the scriptural, formal and rhetorical resources of the carnival towards a sinister and funereal picture. The sociocritical study of these different scenes highlights the links that novels maintain with the social imaginary of the French Revolution, the Restoration and the Second Empire, particularly with regard to the debates on misery, the meaning of power and the notion of progress.
|
47 |
Histoire, Révolution et esthétique : le temps et ses représentations dans le Tableau de Paris et le Nouveau Paris de Louis Sébastien MercierBoucher, Geneviève 11 1900 (has links)
Thèse réalisée en cotutelle avec l'Université Paris-Sorbonne (Paris IV), sous la direction de M. Michel Delon. / Cette thèse a pour objectif d’analyser les représentations du temps historique dans le Tableau de Paris (1781-1788) et le Nouveau Paris (1798) de Louis Sébastien Mercier et de faire voir comment elles se transforment sous l’impact de la Révolution française, elle qui oblige les contemporains à réévaluer leur rapport au temps. Ces œuvres s’inscrivent dans la tradition de la littérature panoramique : l’auteur y décrit l’état de la capitale et donne à voir les mœurs de ses habitants. Si Mercier s’attache à peindre la physionomie actuelle de Paris, il en vient, au fil de ses promenades, à décrypter le passé qui est enfoui, comme un palimpseste, sous la surface présente. L’espace urbain, ainsi peuplé des spectres du passé, fait cohabiter de multiples strates temporelles et donne l’image d’un temps dense au sein duquel différentes époques sont coprésentes. La persistance du passé pose toutefois problème : c’est pourquoi l’héritage antique et national se voit réévalué – voire éradiqué – afin de répondre aux exigences de l’idéologie progressiste. Avec la Révolution, de nouveaux outils conceptuels sont élaborés pour gérer le rapport avec le passé : si les révolutionnaires rejettent, après la Terreur, les entreprises d’épuration par la destruction, ils développent un nouveau mode de mise à distance du passé, la patrimonialisation. Celle-ci, par la conservation même, relègue paradoxalement le passé au rang d’histoire morte.
Le futur occupe également une place de choix chez Mercier, auteur de l’un des premiers romans d’anticipation. Il s’exprime prioritairement sous deux formes, la dégénérescence et la régénération. Alors même qu’il décrit l’état actuel de la ville, Mercier anticipe sa ruine. Une étroite corrélation s’instaure alors entre la construction et la destruction, qui est son aboutissement inéluctable. Ce phénomène s’accompagne de modulations esthétiques majeures : l’évocation de la perte plonge l’auteur dans la mélancolie et teinte son style de lyrisme et d’élégie. Si la Révolution ne fait pas disparaître cet imaginaire, elle le met entre parenthèses et entrevoit surtout son avenir sous la forme optimiste de la régénération. Ce concept clé, qui alimente projets et utopies, fait cohabiter de multiples modèles temporels, tels que la rupture radicale, le retour à l’origine, la régénération instantanée et la construction nationale.
Le fondement du projet de Mercier demeure néanmoins de capter la contemporanéité. Tentant de fixer par l’écriture la fugitivité du temps, l’auteur s’engage dans une course désespérée qui le condamne à être perpétuellement décalé par rapport à l’actualité qu’il cherche à saisir. Au-delà de cette dimension transitoire, Mercier confère au présent une certaine stabilité en l’élevant au rang d’histoire. Ce phénomène touche surtout l’histoire révolutionnaire : afin de terminer la Révolution, les contemporains l’érigent en objet historique et tentent d’en comprendre les mécanismes. Corrélativement, l’histoire révolutionnaire acquiert un statut esthétique. Les réformes poétiques appelées par Mercier depuis le début de sa carrière littéraire (contemporanéité des sujets, originalité stylistique, esthétique de la force et du contraste, invention poétique et néologie) trouvent un terrain d’expression particulièrement fertile dans la représentation de l’histoire récente. / This dissertation analyzes the representation of historical time in Louis Sébastien Mercier’s Tableau de Paris (1781-1788) and Nouveau Paris (1798) and seeks to explain how this representation was transformed by the French Revolution, a major event that changed the way contemporaries conceived their place in history. These two works are considered as panoramic literature: as he walks through the neighbourhoods of Paris, the author describes the state of the city of his day as well as its inhabitants’ customs. Although Mercier is mostly interested in painting the present, his exploration of the city leads him to exhume the past that lies, like a palimpsest, beneath the surface. Crowded with specters from the past, the urban space generates a form of temporal density resulting from the coexistence of various times. But the persistence of the past is also highly problematic: Mercier’s faith in progress implies a constant reevaluation – if not a rejection – of antique references and national heritage. After the 1789 disruptions, new conceptual tools were developed to manage the past. If revolutionaries rejected radical destruction after the traumatic experience of the Terror, they invented a new way to put the past aside – patrimony. It is, paradoxically, by its conservational function that patrimony relegates the past to a status of dead history.
The future also occupies a large place in Mercier’s works. It is represented under two antithetic forms: degeneracy and regeneration. While he describes the physiognomy of the city of his day, the author anticipates its ruin and establishes a strong correlation between construction and destruction (its inescapable outcome). This pessimistic representation of time modifies his aesthetics: as he evokes the ineluctability of loss, the author deals with a melancholy which colours his style with lyricism and elegy. This imaginative world does not entirely disappear with the Revolution, but it is marginalized. After 1789, the future is viewed mainly through the optimistic and utopian notion of regeneration, in which several conceptions of time coexist (radical rupture, return to an uncorrupted original state, instantaneous regeneration, the building of national unity, etc.).
Although Mercier oscillates between past and future, his main goal is to capture a sense of contemporaneousness. As he tries to immobilize the continuous flux of time by writing, he finds himself in a hopeless race in which he is condemned to be perpetually behind the current events he wishes to paint. But Mercier goes beyond the fugitive nature of time and grants the present a status of historical discourse. This historiographical dimension mainly concerns revolutionary history: in order to end the Revolution, contemporaries set it up as historical knowledge and hope to understand its complex evolution. As it acquires an historical status, present history also becomes an aesthetical object. Poetical reforms that had long been called for by Mercier (contemporary topics, stylistic originality, contrast and strength, aesthetical invention and neology) are fully integrated in the representation of recent history.
|
48 |
Histoire, Révolution et esthétique : le temps et ses représentations dans le Tableau de Paris et le Nouveau Paris de Louis Sébastien MercierBoucher, Geneviève 11 1900 (has links)
Cette thèse a pour objectif d’analyser les représentations du temps historique dans le Tableau de Paris (1781-1788) et le Nouveau Paris (1798) de Louis Sébastien Mercier et de faire voir comment elles se transforment sous l’impact de la Révolution française, elle qui oblige les contemporains à réévaluer leur rapport au temps. Ces œuvres s’inscrivent dans la tradition de la littérature panoramique : l’auteur y décrit l’état de la capitale et donne à voir les mœurs de ses habitants. Si Mercier s’attache à peindre la physionomie actuelle de Paris, il en vient, au fil de ses promenades, à décrypter le passé qui est enfoui, comme un palimpseste, sous la surface présente. L’espace urbain, ainsi peuplé des spectres du passé, fait cohabiter de multiples strates temporelles et donne l’image d’un temps dense au sein duquel différentes époques sont coprésentes. La persistance du passé pose toutefois problème : c’est pourquoi l’héritage antique et national se voit réévalué – voire éradiqué – afin de répondre aux exigences de l’idéologie progressiste. Avec la Révolution, de nouveaux outils conceptuels sont élaborés pour gérer le rapport avec le passé : si les révolutionnaires rejettent, après la Terreur, les entreprises d’épuration par la destruction, ils développent un nouveau mode de mise à distance du passé, la patrimonialisation. Celle-ci, par la conservation même, relègue paradoxalement le passé au rang d’histoire morte.
Le futur occupe également une place de choix chez Mercier, auteur de l’un des premiers romans d’anticipation. Il s’exprime prioritairement sous deux formes, la dégénérescence et la régénération. Alors même qu’il décrit l’état actuel de la ville, Mercier anticipe sa ruine. Une étroite corrélation s’instaure alors entre la construction et la destruction, qui est son aboutissement inéluctable. Ce phénomène s’accompagne de modulations esthétiques majeures : l’évocation de la perte plonge l’auteur dans la mélancolie et teinte son style de lyrisme et d’élégie. Si la Révolution ne fait pas disparaître cet imaginaire, elle le met entre parenthèses et entrevoit surtout son avenir sous la forme optimiste de la régénération. Ce concept clé, qui alimente projets et utopies, fait cohabiter de multiples modèles temporels, tels que la rupture radicale, le retour à l’origine, la régénération instantanée et la construction nationale.
Le fondement du projet de Mercier demeure néanmoins de capter la contemporanéité. Tentant de fixer par l’écriture la fugitivité du temps, l’auteur s’engage dans une course désespérée qui le condamne à être perpétuellement décalé par rapport à l’actualité qu’il cherche à saisir. Au-delà de cette dimension transitoire, Mercier confère au présent une certaine stabilité en l’élevant au rang d’histoire. Ce phénomène touche surtout l’histoire révolutionnaire : afin de terminer la Révolution, les contemporains l’érigent en objet historique et tentent d’en comprendre les mécanismes. Corrélativement, l’histoire révolutionnaire acquiert un statut esthétique. Les réformes poétiques appelées par Mercier depuis le début de sa carrière littéraire (contemporanéité des sujets, originalité stylistique, esthétique de la force et du contraste, invention poétique et néologie) trouvent un terrain d’expression particulièrement fertile dans la représentation de l’histoire récente. / This dissertation analyzes the representation of historical time in Louis Sébastien Mercier’s Tableau de Paris (1781-1788) and Nouveau Paris (1798) and seeks to explain how this representation was transformed by the French Revolution, a major event that changed the way contemporaries conceived their place in history. These two works are considered as panoramic literature: as he walks through the neighbourhoods of Paris, the author describes the state of the city of his day as well as its inhabitants’ customs. Although Mercier is mostly interested in painting the present, his exploration of the city leads him to exhume the past that lies, like a palimpsest, beneath the surface. Crowded with specters from the past, the urban space generates a form of temporal density resulting from the coexistence of various times. But the persistence of the past is also highly problematic: Mercier’s faith in progress implies a constant reevaluation – if not a rejection – of antique references and national heritage. After the 1789 disruptions, new conceptual tools were developed to manage the past. If revolutionaries rejected radical destruction after the traumatic experience of the Terror, they invented a new way to put the past aside – patrimony. It is, paradoxically, by its conservational function that patrimony relegates the past to a status of dead history.
The future also occupies a large place in Mercier’s works. It is represented under two antithetic forms: degeneracy and regeneration. While he describes the physiognomy of the city of his day, the author anticipates its ruin and establishes a strong correlation between construction and destruction (its inescapable outcome). This pessimistic representation of time modifies his aesthetics: as he evokes the ineluctability of loss, the author deals with a melancholy which colours his style with lyricism and elegy. This imaginative world does not entirely disappear with the Revolution, but it is marginalized. After 1789, the future is viewed mainly through the optimistic and utopian notion of regeneration, in which several conceptions of time coexist (radical rupture, return to an uncorrupted original state, instantaneous regeneration, the building of national unity, etc.).
Although Mercier oscillates between past and future, his main goal is to capture a sense of contemporaneousness. As he tries to immobilize the continuous flux of time by writing, he finds himself in a hopeless race in which he is condemned to be perpetually behind the current events he wishes to paint. But Mercier goes beyond the fugitive nature of time and grants the present a status of historical discourse. This historiographical dimension mainly concerns revolutionary history: in order to end the Revolution, contemporaries set it up as historical knowledge and hope to understand its complex evolution. As it acquires an historical status, present history also becomes an aesthetical object. Poetical reforms that had long been called for by Mercier (contemporary topics, stylistic originality, contrast and strength, aesthetical invention and neology) are fully integrated in the representation of recent history. / Thèse réalisée en cotutelle avec l'Université Paris-Sorbonne (Paris IV), sous la direction de M. Michel Delon.
|
49 |
L'usage de l'œuvre, un autre paradigme artistico-littéraire de la deuxième révolution industrielle jusqu'à nos jours : Marcel Proust, Georges Bataille, Pascal Quignard / The Way of the artwork, another artistic-literary paradigm from the second industrial revolution to the present day : Marcel Proust, Georges Bataille, Pascal QuignardGauthier, Rodolphe 17 September 2018 (has links)
Il s'agit, en prenant comme jalons l’œuvre de trois auteurs symptomatiques, Marcel Proust(1871-1922), Georges Bataille (1897-1962) et Pascal Quignard (1948), d'étudier l'évolution de la place et du rôle de l’œuvre d'art dans la littérature depuis la deuxième révolution industrielle jusqu'à nos jours. Ce travail interroge donc les données structurelles, socio-économiques et politiques, qui constituent l'agencement d'une production artistique, mais aussi les évolutions dans les rapports sujet/objet, la définition de l'art, l’étude de tropes spécifiques, la préférence d'un mouvement descendant à un mouvement ascendant (transcendantal), l'expérimentation comme fondement cognitif, la préférence d'une posture d'étant-au-monde à la notion d'être-au-monde, l'abandon de l'idéalisme et de la métaphysique pour l'élaboration d'autres régimes ontologiques mais aussi épistémologiques. Ces éléments composent ce que nous pouvons appeler un paradigme de l’ombre, paradigme mineur par rapport à un paradigme majeur, dominant, coercitif. / This thesis deals with the work of three symptomatic authors, Marcel Proust (1871-1922),Georges Bataille (1897-1962) and Pascal Quignard (1948), as milestones, in order to studythe evolution of the place and the role of the piece of art in literature since the second Industrial Revolution until today. This work therefore questions the structural,socioeconomic and political data, which constitute the agency of an artistic production, but also evolution in the subject-object relations, definition of what art is, specific tropes,preference of a downward movement to an ascending (transcendental) movement,experimentation as a cognitive foundation, the preference of a position of being-in-theworld to the notion of being-in-the-world, the abandonment of idealism and metaphysics for the development of other ontological regimes. These elements compose what we can call a paradigm of the shadow, a minor paradigm compared to a major, dominant and coercive one.
|
Page generated in 0.0735 seconds